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samedi, 28 novembre 2009

Un dimanche matin sur France Inter

Laurence Garcia apporte les croissants chez Philippe Sollers, à écouter ici

Au cours de l'émission, on pourra écouter ce petit bijou : Norwegian Wood des Beatles

mercredi, 25 novembre 2009

sa conception du temps n’est pas la nôtre

0f3226a3.jpg"Il y a une guerre incessante : celle qui nous saute à la figure à travers le terrorisme déchaîné par la stratégie directe. Et une guerre plus secrète qui se mène sans cesse, pas seulement économique, et dont les Chinois sont en train de tirer la plupart des fils. Si l’adversaire est unilatéral, je vais faire du multilatéralisme ; comme l’adversaire est capitaliste, je vais devenir encore plus capitaliste. Pratiquer la défensive stratégique, utiliser la force de l’adversaire pour la retourner en ma faveur. Le Chinois s’appuie d’instinct sur la compréhension interne de ce que l’adversaire ose, veut, calcule et est obligé de faire. Il mène une guerre défensive qui peut durer une éternité : sa conception du temps n’est pas la nôtre. Cette guerre peut se prolonger indéfiniment pour user l’adversaire. Elle ne cherche pas l’anéantissement, mais la domination."

Philippe Sollers, Guerres secrètes, Editions Carnets Nord, 2007

dimanche, 22 novembre 2009

Le Maître est énorme et nu

Celebrity-Image-Harold-Lloyd-235642.jpg« Car l’Adversaire est inquiet. Ses réseaux de renseignement sont mauvais, sa police débordée, ses agents corrompus, ses amis peu sûrs, ses espions souvent retournés, ses femmes infidèles, sa toute-puissance ébranlée par la première guérilla venue. Il dépense des sommes considérables en contrôle, parle sans cesse en termes de calendrier ou d’images, achète tout, investit tout, vend tout, perd tout. Le temps lui file entre les doigts, l’espace est pour lui de moins en moins un refuge. Les mots « siècle » ou « millénaire » perdent leur sens dans sa propagande. Il voudrait bien avoir pour lui cinq ou dix ans, l’Adversaire, alors qu’il ne voit pas plus loin que le mois suivant. On pourrait dire ici, comme dans la Chine des Royaumes combattants, que « même les comédiens de Ts’in servent d’observateurs à Houei Ngan ». Le Maître est énorme et nu, sa carapace est sensible au plus petit coup d’épingle, c’est un Goliath à la merci du moindre frondeur, un Cyclope qui ne sait toujours pas qui s’appelle Personne, un Big Brother dont les caméras n’enregistrent que ses propres fantasmes, un Pavlov dont le chien n’obéit qu’une fois sur deux. Il calcule et communique beaucoup pour ne rien dire, l’Adversaire, il tourne en rond, il s’énerve, il ne comprend pas comment le langage a pu le déserter à ce point, il multiplie les informations, oublie ses rêves, fabrique des films barbants à la chaîne, s’endort devant ses films, croit toujours dur comme fer que l’argent, le sexe et la drogue mènent le monde, sent pourtant le sol se dérober sous ses pieds, est pris de vertige, en vient secrètement à préférer mourir. » 

Philippe Sollers, Eloge de l’Infini. Janvier 2001

mercredi, 18 novembre 2009

Les deux !

louise_brooks.jpgL’art baroque — peinture et musique — qu’il faudrait d’ailleurs appeler l’art catholique, passe volontiers, on le sait, du sacré au profane sans contradiction : « Le plus souvent, on feint hypocritement de s’étonner d’un paradoxe irritant : Vierge Marie d’un côté ; prolifération voluptueuse de l’autre. Remarque de bon sens, donc de très courte vue. C’est  précisément à cause de l’Une qu’on obtient les autres. Titien ou Rubens auraient trouvé dépourvu de sens qu’on leur demande de choisir, de se limiter, de s’en tenir à la Vierge  ou à Vénus. Les deux, chers puritains, les deux ! » (Philippe Sollers, Eloge de l’infini).

Photo : Louise Brooks

mercredi, 04 novembre 2009

Le roman et le temps

179Fitzcarraldo1982.jpg"Il n'y a que lui, le roman, pour l'affirmer, le temps, le retourner, le transformer, le retrouver, le faire respirer sous nos yeux comme une peau d'étalon de course, l'isoler, l'écouter, le dilater et le contracter, l'accélérer, le freiner, lui, et le cavalier qui l'écrit, qui le lit ; qui écrit et lit sa propre vie comme elle est vraiment."

Philippe Sollers, Grand beau temps

vendredi, 30 octobre 2009

Empêchement des affinités électives

"Aujourd’hui, je constate que le programme de la société, qui œuvre à une séparation tyrannique entre les hommes et les femmes pour que chacun reste à sa place, est une forme de censure, d’empêchement des affinités électives."

Lire ici une interview de Philippe Sollers par Vincent Roy, parue dans l'Infini n° 108

vendredi, 23 octobre 2009

Paradis

189110630.jpgÊtes-vous assez joyeux pour le paradis ?

Philippe Sollers, Grand beau temps

jeudi, 22 octobre 2009

Que veut une femme ?

47799_une-giacometti.jpgPénélope tarde à reconnaître Ulysse, elle ne le reconnaît que dans la façon dont il lui décrit son lit. Cela me permet de dire de Pénélope, retrouvant après vingt ans son Ulysse sur lequel elle a beaucoup pleuré, qu’elle couche à ce moment là davantage avec un lit qu’avec un homme. Il faudrait que tous les maris de la terre, pour autant qu’ils ont noué ce lien toujours teint de sacralité avec une femme, sachent qu’au bout du compte, elles couchent plutôt avec un lit qu’avec un homme.
Pourquoi ? Que veut une femme ? se demandait beaucoup Freud. Homère ; sans effort, nous montre la solution : ce qu’elle veut, en tant qu’elle n’est pas contaminée de divin, c’est un lien, c’est même un lien absolu.
Philippe Sollers, Guerres Secrètes

mardi, 20 octobre 2009

Le gnostique

nng3_images.jpgLe gnostique cherche une victoire sur la mort à l’intérieur même du temps. C’est exactement ce que je fais, comme Roland Barthes a bien voulu s’en rendre compte dans Sollers écrivain, lorsqu’il évoque ce qui est en jeu dans Drame comme un « éveil » qui serait un « temps complexe, à la fois très long et très court ». «  C’est un éveil naissant – dit-il -, un éveil dont la naissance dure. » Le savoir de la résurrection comme seconde naissance se donne et se redonne sans arrêt. Il n’est jamais acquis. On peut le définir très exactement comme une « naissance qui dure ». Le temps qu’on nous inflige n’est pas celui que je dis. Ne croyez pas là une formule, mais la ligne de risque de mon existence. Je n’en ai jamais eu d’autre. Et c’est ce qui, dans mon cas, restera inexpiable pour le Gros Animal qu’est la société.
(Philippe Sollers, LIGNE DE RISQUE, n°24, 2009)

mercredi, 07 octobre 2009

Plus l'espace est illluminé

47_Kameyama.jpg"Plus le corps est une limite consciente, plus l'espace est illluminé"

Philippe Sollers, Passion fixe

Hiroshige

dimanche, 04 octobre 2009

Plus profonds, plus dérapants, plus durs

1238099133_685e1ac2f6.jpg"Pour moi aussi, c'était le retour, mais les retours ne sont jamais ce qu'on imagine, ils sont chaque fois plus profonds, plus dérapants, plus durs."

Philippe Sollers, Le Secret

Guido Reni, Beatrice Cenci

mercredi, 23 septembre 2009

Tu te souviendras

homage-to-munkacsi-carmen-coat-by-cardin-place-francois-premier-paris-august-1957-richard-avedon.jpg"Si tu veux rejouer le COUP FOUDROYANT de Dada, révoque les fantômes à vide de l'avant-gardisme. Ainsi tu ne diras jamais : "Je ne veux pas savoir s'il y a eu des hommes avant moi." Tu te SOUVIENDRAS, au contraire, qu'il y a eu des hommes, et qu'ils ont produit ces gestes, ces phrases, ces oeuvres, que ton cerveau ramène à chaque instant à leur intégrité."

Philippe Sollers

Photo de Richard Avedon

vendredi, 18 septembre 2009

Toute conversation se réduit désormais...

rearWindow.jpg” Toute conversation se réduit désormais à une succession de monologues alternés où chacun, à toute allure, fait sa propre publicité en face de l’autre. On se tronperait en donnant de ce phénomène criant une interprétation psychologique. Non, votre interlocuteur n’est pas “ narcissique “, ” arriviste “, ” autistique “, voire ” paranoïaque ” : c’est une particule du spectacle, il ne peut pas faire autrement.”

Philippe Sollers, Carnet de nuit

mardi, 08 septembre 2009

L'espace est fait de points de densité de méditation

magritte43.jpgMes seuls témoins aujourd'hui, sont les montagnes, les prés, ce lac, ce rocher, cet océan, ces mouettes. L'espace est fait de points de densité de méditation (là où quelque chose s'est vraiment passé, en réalité des trous dans l'abîme). Le temps se mesure autrement. Il se démesure, plutôt, ni trop tard, ni trop tôt. Il vide.

Philippe Sollers, Grand beau temps, Le Cherche Midi éditions, 2008

Magritte, Le domaine d'Arnheim

samedi, 04 juillet 2009

L'évangile selon saint Selon

 P5244654.jpgRimbaud, qui, écrit-il, devient un " opéra fabuleux " (paroles et musique), voit son âme éternelle, et lui donne l'ordre, en la tutoyant, d' " observer son voeu, malgré la nuit seule et le jour en feu ". Un voeu qu'on a prononcé, et qu'on observe (double sens du mot) , passe au-delà de la nuit et du jour. Là, de façon peu démocratique, elle se " dégage des humains suffrages, des communs élans, elle vole selon ".
Le mot important, ici, est selon.
Selon quoi ? Le vent, les circonstances, les situations ? En tout cas, elle vole, cette âme éternelle, c'est un oiseau en langue des oiseaux, un oiseau qui connaît seul sa destination. C'est un nouvel évangile, l'évangile selon saint Selon. En bas, sur terre, plus d'espérance, d'aurore, d'apparitions, de lendemains qui chantent, rien que science, patience, " supplice sûr ", " braises de satin ", " ardeur et devoir ". En haut, le vol sur la mer mêlée de soleil, en bas, la forge infernale du temps aplati. Est-il possible de vivre à la fois et en même temps dans ces deux mondes contradictoires ? L'un d'oiseau sans contraintes, l'autre de piéton clandestin des saisons ?
 
 
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Philippe Sollers
Les voyageurs du temps
Il s’exprime dans des discours extravagants, dans des paroles inédites, dans des expressions sans queue ni tête, parfois trop libres, mais sans partialité, car sa doctrine ne vise pas à traduire des points de vue particuliers. Il juge le monde trop boueux pour être exprimé dans des propos sérieux. C’est pourquoi il estime que les paroles de circonstance sont prolixes, que les paroles de poids ont leur vérité, mais que seules les paroles révélatrices possèdent un pouvoir évocateur dont la portée est illimitée. Ses écrits, bien pleins de magnificence, ne choquent personne, parce qu’ils ne mutilent pas la réalité complexe. Ses propos, bien qu’inégaux renferment des merveilles et des paradoxes dignes de considération. Il possède une telle plénitude intérieure qu’il n’en peut venir à bout. En haut, il est le compagnon du créateur ; en bas il est l’ami de ceux qui ont transcendé la mort et la vie, la fin et le commencement. La source de sa doctrine est ample, ouverte, profonde et jaillissante ; sa doctrine vise à s’harmoniser avec le principe et à s’élever à lui. Et pourtant, en répondant à l’évolution du monde et en expliquant les choses, il offre une somme inexprimable de raisons qui viennent, sans rien omettre, mystérieuses, obscures et dont personne ne peut sonder le fond."

Tchouang-tseu

dimanche, 21 juin 2009

L'Annonciation, vue par Philippe Sollers

annonciation4_copy.gifL’Archange Gabriel à la Vierge Marie : « Ecoutez, vous allez concevoir, venant de Dieu, un lapsus mémorable. » - « Quoi ? » - « Pas un organe, un homme. » - « Pas possible ! » - « Vous n’acceptez pas ? » - « Si, si ! » -  « Vous serez rétribuée par une superbe Pietà, je discerne dans l’avenir l’artiste qui la sculptera, cadavre exquis de votre fils-dieu-père légèrement allongé sur vos genoux. Juste le temps de poser, hein, vous ne pourrez pas garder le corps, il doit ressusciter et monter au ciel. » - « C’est dur. » - « Sans doute, mais, par la suite, vous monterez  vous aussi au ciel avec votre vrai corps d’aujourd’hui. » - « Mon corps ? Mais que voulez-vous que j’en fasse ? Il me déplaît, il me gêne, j’ai encore grossi ces temps-ci. » - « Vous serez réparée là-haut, très belle, éternellement. » - « Hum. » - « Toujours vierge, jeune, belle, blanche, bleue, rayonnante et toujours plus belle, couronnée du soleil, des étoiles, objet d’une adoration perpétuelle, faisant des miracles, apparaissant même de temps en temps aux mortels. » - « Vous allez trop loin. » - « Pas moi, mais Dieu votre père qui a besoin de devenir votre fils pour être pleinement père dans son omnipotence, sa munificence, son insondable présence, son incomparable distance. » - « Bon, mettons. »

Philippe Sollers, Le Secret

L'annonciation Fra Angelico 1433 Retable (détail)

mercredi, 10 juin 2009

Le temps, lui, ne peut être, à chaque instant, que vertical, étagé, feuilleté, poudroyant, ouvert

edouard-manet-06.jpg« La désorientation est constante, ponctuelle, courbée, systématique, mais n’engendre aucun désordre, au contraire. L’espace est simplement doublé et organisé en reflet, comme un échiquier. Les canaux, les piquets, les ruelles, les quais, les bateaux, les places, les ponts, les puits, le dallage même, orchestrent cette mise en scène géométrique. Le temps, lui, ne peut être, à chaque instant, que vertical, étagé, feuilleté, poudroyant, ouvert. Venise est un entrelacement de chemins qui ne mènent nulle part et qui se suffisent à eux-mêmes ; une horloge où toutes les heures sont égales » Philippe Sollers, Eloge de l’infini

Edouard Manet, Le Grand Canal à Venise, 1874

samedi, 06 juin 2009

Du coup, une autre vision se dessine

giovanni_bellini_san_zaccaria_venise_6.jpg"Il y a les écrits qu’on lit distraitement, ceux qu’on lit en sachant qu’on ne les relira jamais, et puis, en très petit nombre, ceux qu’on relit sans cesse. On les sait presque par cœur, à la virgule près, mais, rien à faire, ils révèlent toujours quelque chose de nouveau, ils sont actifs sans en avoir l’air, ce sont des émetteurs constants, des trésors. Ils font signe. Du coup, une autre vision se dessine."

Philippe Sollers, Les voyageurs du temps, roman

Giovanni Bellini, L'ange musicien

mercredi, 20 mai 2009

«On n'habite pas un pays, on habite une langue. Une patrie, c'est cela, et rien d'autre»

cioranfoto.jpgA lire ici, un intéressant article de Philippe Sollers sur Cioran, paru dans le nouvel Obs

mercredi, 06 mai 2009

Le bon plaisir de Philippe Sollers

TQ64Joyce_freund1-2.jpgArchives sonores : on peut écouter ici l'émission Le bon plaisir de Philippe Sollers, sur France Culture, en 1987

Il y est notamment question de pensée ( extrait 3. La forme de la pensée contemporaine)

et de cette photo de James Joyce par Gisèle Freund

" Je ne suis pas bien vu par les douaniers du système littéraire, les gens du milieu ; mais je suis lu par les simples gens ou les érudits ".